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Raymond Vanbrugghe en visite sur le site
de l’ancienne abbaye de Beaupré-sur-la-Lys le 2 juillet 1992

15 février 2010, par Sœur Nathalie

L’abbaye de Beaupré-sur-la-Lys

Le site de l’ancienne abbaye cistercienne féminine de Beaupré-sur-la-Lys se trouve à une trentaine de kilomètres à l’ouest de Lille. Fondé au XIIIe siècle, le monastère fut détruit à la fin de la Révolution. En 1991, un projet de dérivation du cours de la Lys, envisagé par l’usine du groupe Roquette, menaçait de destruction les substructions encore en place. M. Jean COUPET, dont la famille est propriétaire du site, mit comme condition suspensive à la cession des terrains l’ouverture d’un chantier archéologique.

http://abbaye.beaupre.free.fr

Commencée le 1er avril 1992, la fouille de l’ancienne abbaye de Beaupré-sur-la-Lys devait durer deux mois. C’est le délai qui avait été convenu pour effectuer les fouilles avant la réalisation du projet de dérivation de la Lys par l’entreprise Roquette. À la fin de ce délai, le travail archéologique avait permis de dégager l’ensemble des fondations des trois ailes du cloître : ailes du chapitre, du réfectoire et du logis abbatial, le quatrième côté, occupé par l’église, étant en dehors de l’emprise des fouilles. Le site était devenu très « lisible » et avait révélé de solides fondations en grès du XIIIe siècle. Au terme de cette première campagne de fouilles, il fut décidé que l’on prolongerait l’exploration archéologique durant tout le mois de juin et début juillet et l’entreprise Roquette mit à la disposition des archéologues une pelle mécanique pour dégager l’extérieur des fondations de manière à connaître leur profondeur. C’est ainsi qu’on put se rendre compte que l’aile du réfectoire, située au nord, au bord de la Lys était bâtie sur des fondations profondes d’environ trois mètres. À l’extrémité de cette aile, c’est-à-dire dans le prolongement de l’aile du chapitre, au-dessus duquel devait normalement se trouver le dortoir des moniales, on découvrit les vestiges de voûtes d’un canal qui était très probablement le canal des latrines.

À la fin de ces prolongements de fouilles, au début du mois de juillet, on était en train de creuser ce canal quand papa et maman vinrent passer quelques jours à Lille. Je proposai à papa de m’accompagner le jeudi 2 juillet sur le chantier. Il accepta visiblement avec joie. Le travail à ce moment-là était très animé sur le chantier car en plus des fouilleurs qui continuaient le patient dégagement manuel des fondations des carrelages et des sépultures, le travail à la pelle mécanique nécessitait une vigilance supplémentaire de chaque instant. Au moment de la pause de midi, j’emmenai papa déjeuner et nous passâmes un moment très fort où je lui racontai toutes les péripéties de ce chantier passionnant qui avait pris toute la place dans ma vie. Quand nous retournâmes sur le chantier, les ouvriers avaient déjà repris le travail et ils nous attendaient car ils avaient mis au jour de grandes dalles trapézoïdales au fond du canal des latrines.

La découverte était de taille : trois dalles funéraires en marbre noir de Tournai étaient placées tête-bêche de manière à former le dallage de fond du canal. Deux d’entre elles montraient leur face décorée d’un arbre de vie. Ce type de dalle anépigraphe (sans aucune inscription), de forme trapézoïdale, en marbre noir, avec ce décor de l’arbre de vie, est typique d’une production des ateliers tournaisiens du début du XIIIe siècle. Ma nièce Élodie SONNEVILLE, qui effectuait alors un travail de recherche sur un ensemble de pierres tombales médiévales me fournit aussitôt une documentation qui me permit de les identifier
 [1]. Les illustrations ci-contre montrent la photographie de deux de ces dalles et le croquis d’interprétation où apparaît l’arbre de vie.

Nous étions donc très probablement en présence de pierres tombales des premières moniales de Beaupré. Une photo prise par Alban DUPONT, membre de l’association ABESS (Abbaye de Beaupré - Étude et Sauvegarde du Site) montre l’instant du dégagement de ces trois pierres. Au sommet de la fondation, papa se penche pour mieux voir. Je suis en train de nettoyer les pierres pour en faire apparaître le motif.

Le thème de l’arbre de vie se trouve dans les premières pages de la Bible, au livre de la Genèse, dans le récit d’Adam et Ève au Jardin d’Eden (Gn 2,9 et Gn 3) et il est repris dans le livre de l’Apocalypse : “ Au vainqueur, je donnerai à manger de l’arbre de vie qui est dans le paradis de Dieu ” (Ap 2,7). Chassé du paradis, l’homme avait été écarté de l’arbre de vie. Jésus ressuscité, vainqueur de la mort, réalise l’attente juive du Messie qui ouvrira les portes du paradis et donnera à ceux qui croient en lui de manger de l’arbre de vie. La dernière page du livre de l’Apocalypse évoque encore l’arbre de vie dont le feuillage sert à la guérison des nations (Ap 22,2).

Abbaye Notre-Dame de Bonne Espérance, Échourgnac

[1VANBRUGGHE (N.), Les inscriptions lapidaires de l’abbaye de Beaupré-sur-la-Lys, Bulletin de la Commission départementale d’histoire et d’archéologie du Pas-de-Calais, 1996, t. XIV-3, p. 557-572. Les croquis et photographies sont extraits de cet article.

Le blason de l’ordre des Cisterciens (en logo) a été dessiné par Piotr Jaworski, PioM.


Article mis à jour le 23 mars 2010