[/“Avec le très grand plaisir de me retrouver chez moi”
Marguerite Yourcenar dans le livre d’or de “son” musée le 3 mai 1986/]
Charles Cleenewerck de Crayencour, grand-père de celle qui deviendra Marguerite Yourcenar (anagramme de Crayencour), est né le 15 février 1822 à Bailleul dans une famille de l’ancienne bourgeoisie de Flandre.
Charles épouse en 1851 Noémie Dufresne née en 1828 à Lille. L’aîné de leurs enfants, Michel Cleenewerck de Crayencour, naît le 10 août 1853 à Lille. Sa deuxième épouse Fernande de Cartier de Marchienne, de nationalité belge, met au monde Marguerite, le 8 juin 1903 à Bruxelles. Elle meurt quelques jours plus tard des suites de l’accouchement [1].
Michel de Crayencour quitte alors Bruxelles et revient avec Marguerite dans la demeure du mont Noir - le "château" - habitée par la grand-mère Noémie. Pendant ses dix premières années, la petite fille y passera l’été alors que, l’hiver, elle habitera à Lille dans un hôtel particulier 26, rue Marais (devenue aujourd’hui rue Jean Moulin).
Le château, vendu en 1912, sera totalement détruit durant la première guerre mondiale en 1918 et ne sera jamais reconstruit.
Marguerite ne fréquente pas l’école, étudiant avec son père ou des précepteurs. À 17 ans, elle passe son baccalauréat à Aix-en-Provence. L’année suivante, elle écrit un premier livre consacré au poète Pindare.
Après de nombreux voyages, Marguerite s’installe en 1942 aux États-Unis où elle achètera en 1950 une maison à Petite-Plaisance (Maine).
C’est en 1951 que paraissent les Mémoires d’Hadrien dont le succès lui permet d’abandonner l’enseignement pour se consacrer exclusivement à l’écriture. En 1968, elle reçoit le prix Fémina pour L’oeuvre au noir.
Élue à titre de membre étranger à l’Académie belge de Langue et de Littérature françaises en 1971, elle est la première femme élue à l’Académie française, au fauteuil de Roger Caillois, le 6 mars 1980 et sera reçue sous la coupole le 22 janvier 1981 par Jean d’Ormesson.
Elle décède le 18 décembre 1987 à Mount-Desert à l’âge de 84 ans.
En 1977, mon oncle, Louis Sonneville, ancien directeur d’école, est installé à Saint-Jans-Cappel. Admirateur de Marguerite Yourcenar, il décide de lui envoyer aux États-Unis quelques oignons de jacinthes et une poignée de terre du mont Noir.
En effet, au mois de mai, les sous-bois du mont Noir sont entièrement couverts de jacinthes [2] et Marguerite Yourcenar en a gardé un vivant souvenir. Dans une lettre amicale, elle remerciera Louis Sonneville pour "le plaisir teinté d’émotion que [lui] a fait cet envoi".
Ce fut le début d’une correspondance ponctuée de réalisations et projets [3] ; parmi ceux-ci, la naissance d’un petit musée dont la vocation didactique se double d’un hommage de la Flandre au prestigieux auteur des Archives du Nord.
À maintes occasions, Marguerite Yourcenar revient en Flandre, en particulier le 15 décembre 1980 où la nouvelle "immortelle" est reçue avec émotion et fierté par ses admirateurs.
Le 10 avril 1982, à Bailleul, elle préside la présentation solennelle de la Fondation Marguerite Yourcenar. Le 3 mai 1986, elle visite "son" musée à Saint-Jans-Cappel, inauguré en 1985 par Maurice Schumann de l’Académie française.
Le Conseil général du Nord, propriétaire de l’ancien domaine familial de Crayencour, crée sur ce site la Villa Mont Noir, centre départemental de résidence d’écrivains européens.
La Villa Mont Noir accueille des écrivains pour leur permettre de travailler dans un lieu retiré et paisible, mais aussi pour faire découvrir leurs œuvres au public.
[1] Suite au décès prématuré de ses deux premières femmes Michel de Crayencour fera ajouter, entre 1903 et 1910, deux chapelles à l’église de Saint-Jans-Cappel.
[2] Sentier des jacinthes, créé par le Comité Départemental de Tourisme du Nord
[3] Marguerite YOURCENAR de retour en Flandre, Louis Sonneville, 15 décembre 1980, Centre régional de documentation pédagogique, Lille