À une quarantaine de kilomètres au sud-est de Turfan se trouve la nécropole d’Astana. C’était le cimetière de la ville antique de Gaochang, encore appelée Qocho, qui n’en est éloignée que de deux kilomètres. Le site fut découvert par Aurel Stein.
Ce qui frappe lorsqu’on arrive aujourd’hui sur le site, c’est l’affirmation du lieu en tant qu’espace chinois.
L’accès aux monuments qui apparaissent sur la photo précédente est précédé d’une place circulaire autour de laquelle s’alignent les statues des animaux du calendrier chinois. Dotés d’une tête qui permet de les identifier sans ambiguïté, ils sont représentés avec un corps humain et vêtus à la mode chinoise.
On découvre ensuite une statue de Nuwa et Fuxi, deux divinités tutélaires de la Chine antique. Selon la mythologie chinoise, Fuxi est le frère et l’époux de Nuwa. Tandis que cette dernière gouverne la terre, Fuxi dirige le ciel. Ils sont traditionnellement représentés avec des corps humains et des queues de serpent enlacées. Fuxi brandit une équerre tandis que Nuwa tient un compas. Leur couple engendre les hommes.
La figuration du couple mythique renvoie à des soieries brodées trouvées dans des tombes chinoises de la région de Turfan.
L’histoire de la région permet de mieux comprendre ce qu’on vient de voir. Les Chinois ont commencé à s’établir dans le bassin de Turfan à l’époque du développement des premiers échanges commerciaux le long de la Route de la soie, au début du Ier siècle av. J.-C. sous la dynastie des Han. Aux alentours du Ve siècle, ils formaient une importante communauté à Gaochang.
Dès le milieu du VIe siècle, les Göktürks, nom donné à une fédération de tribus turcophones et chamanistes, s’emparèrent du secteur et contrôlèrent le commerce sur la Route de la soie.
La région repassa sous domination chinoise vers 640, sous la dynastie des Tang. Ceux-ci firent de Gaochang un important avant-poste militaire et reprirent le contrôle de la Route de la soie. La domination des Tang prit fin en 763, lorsque les Tibétains s’emparèrent de la région, coupant ainsi la Chine d’un de ses accès à la Route de la soie. Les Chinois cessèrent alors de se faire enterrer à Astana.
Les Ouïgours, population turcophone, arrivèrent dans la région au milieu du IXe siècle, mais à cette époque-là, le cimetière d’Astana n’était déjà plus utilisé.
Nous visitons les trois tombes ouvertes au public mais les photos y sont interdites.
L’une d’entre elles renferme des corps "momifiés" ou plus précisément naturellement desséchés.
Des vestiges trouvés dans les 350 tombes qui ont été fouillées sont présentés, pour certains, au musée de Turfan et, pour d’autres, au musée du Xinjiang à Urumqi.
En raison des conditions de conservation exceptionnelles liées à la sécheresse, un grand nombre d’objets déposés dans les tombes ont été conservés : vêtements de soie et de laine, statuettes d’argile ou de bois sculpté, papier, (documents officiels, livres de comptes, correspondance privée)... De très nombreux vestiges sont d’époque Tang (618-907).
Les plus anciens documents trouvés dans les tombes sont datés de l’an 273 et les plus récents de 778. Le cimetière fut donc utilisé pendant 500 ans. Les textes concernent la politique, l’économie, les opérations militaires... Ils fournissent des informations sur les modes de vie des personnages importants et des renseignements relatifs à leur biographie.
La photo qui suit, prise au musée provincial du Xinjiang à Urumqi, donne une idée du décor des tombes.