Le musée des Beaux-arts d’Arras occupe une partie des vastes espaces de l’ancienne abbaye Saint-Vaast, désaffectée depuis la Révolution.
Aujourd’hui rénovés, les locaux de l’abbaye accueillent un centre culturel municipal incluant, outre le musée proprement dit, une médiathèque, des espaces d’expositions temporaires et des salles dédiées aux activités municipales.
La photo de droite est une vue longitudinale de l’ancien réfectoire des moines qui sert aujourd’hui de salle de réunion. Des éléments de son décor ont été conservés.
Ci-dessus à gauche, une grande toile de Jacob Jordaens, datée de 1665-1675, évoque une alliance abbassido-carolingienne tentée au cours des VIIIe et IXe siècles. Une série d’ambassades, de rapprochements et d’opérations militaires conjointes marquèrent le rapprochement entre l’empire carolingien et le califat abbasside. Ces contacts faisaient suite au conflit entre les Carolingiens et les Omeyyades de Cordoue, marqué par la bataille de Poitiers en 732. Ils visaient à établir une contre-alliance avec les lointains Abbassides.
Deux œuvres monumentales marquent l’accès au musée.
Au pied de l’escalier donnant accès aux collections se dresse une statue antique restaurée en Marc-Aurèle.
À part le torse et une partie de la peau de bête constituant le manteau, les éléments antiques de la statue se réduisent à la partie supérieure du bras droit, au haut de la cuisse et au genou gauches. Le manteau suggère que la statue originale représentait vraisemblablement un empereur en Hercule.
Tout le reste (tête, partie supérieure du cou, bras, avant-bras, mains, jambes, pieds, partie flottante du manteau, plinthe, palmier) est une restauration d’époque Renaissance.
Ci-dessous, un grand tableau d’histoire du peintre Joseph Court est un dépôt du musée du Louvre représentant la mort de César.
Les licteurs viennent de déposer le corps de César au sommet de la tribune aux harangues du Forum. Antoine brandit la tunique ensanglantée du Consul afin d’exciter le peuple romain contre les meurtriers.
Ces derniers, Cassius et Brutus, sont au premier plan, à gauche, sous le regard menaçant de la foule. Un vieillard les désigne de son doigt tendu et un homme, en bas à droite, s’apprête à leur lancer des pierres.
La légende de saint Vaast
Saint Vaast (Waast, Vedast ou Gaston), patron de la ville, vécut au VIe siècle et fut en particulier évêque d’Arras. L’épisode le plus célèbre de sa légende relate qu’il apprivoisa un ours qui terrorisait la cité et errait dans la cathédrale. Cet épisode est illustré sur la tapisserie ci-dessous où Vaast apparaît, en tenue d’évêque, aux portes de la ville, en train d’apprivoiser l’ours.
Arras était célèbre depuis le XIIIe siècle dans le monde médiéval pour ses tapisseries de très grande qualité. De très rares exemples en sont aujourd’hui conservés. Celle-ci, qui date du XVe siècle, faisait à l’origine partie d’un grand ensemble (une tenture) illustrant la légende du saint patron de la ville.
La légende de la Sainte-Chandelle
En 1105, une terrible maladie décime la population : le "mal des ardents" qui brûle de douleurs ceux qui en sont atteints et où chacun voit une punition divine. À la même époque, deux jongleurs, se vouent une haine mortelle, le frère de l’un ayant été tué par l’autre.
Une nuit pourtant, ils font tous deux un même rêve : la Vierge leur apparaît et leur enjoint de se rendre à la cathédrale et de s’y réconcilier devant l’évêque. Après une nuit de prières, Marie se montre aux trois hommes et leur remet un cierge allumé, leur demandant de faire couler la cire dans l’eau et de la donner à boire aux malades. Ceux-ci sont alors miraculeusement guéris.
Le cierge, mis à l’abri, est par la suite conservé par une confrérie. Chaque années, des processions sont organisées en mémoire de l’évènement et la relique de la chandelle devient l’objet d’un culte.
La photo de gauche montre une huile sur toile de 1664 représentant la chapelle de la Sainte-Chandelle. Cet ensemble architectural fut élevé vers 1200 par la confrérie des jongleurs, sur la Petite place (aujourd’hui place des Héros) pour abriter la relique de la Sainte-Chandelle. Aujourd’hui détruit, il existait encore au début du XVIIIe siècle.
Le reliquaire en forme de chandelle est exposé à côté de cette toile. Réalisé vers 1220-1240 en Artois, il a été restauré au XIXe siècle.
Les Mays sont une série de tableaux offerts par la Confrérie des orfèvres, presque chaque année, en mai, entre 1630 et 1707, à la cathédrale Notre-Dame de Paris, en hommage à la Vierge.
Ces grands tableaux d’environ 3,5 mètres sur 2,5 étaient commandés à des peintres de renom, presque tous choisis, à partir de 1648, parmi les membres de l’Académie royale de peinture. On les accrochait sur les piliers de la cathédrale, au niveau des arcades de la nef ou du chœur.
Au nombre de 76, les Mays furent dispersés à la Révolution et on en connaît aujourd’hui une quarantaine. Le musée d’Arras en compte quatorze, en dépôt depuis 1938, dont sept étaient exposés lors de notre visite, parmi d’autres grands formats.
Les sujets des Mays sont, jusqu’en 1672, extraits d’épisodes des Actes des Apôtres.
Huit autres toiles exposées dans la salle complètent ce panorama exceptionnel de l’art religieux du XVIIe siècle. L’une d’entre elles figure ci-dessous.
Cette huile sur toile de 1711 est un carton de tapisserie pour le prieuré royal de Saint-Martin-des-Champs à Paris. La scène fait référence à un épisode de la Bible où Jésus, reconnu comme le Messie, est invité chez Simon. Il y défend, contre ses disciples et son hôte, une femme pécheresse qui lui verse un parfum sur la tête ou les pieds (selon les versions). Le peintre s’est représenté à droite, avec ses deux filles, entre les colonnes.
Et pour visiter la ville d’Arras, c’est là-bas.