Au Palazzo reale, une grande pinacothèque italienne
La galerie Sabauda fut créée par le roi Charles-Albert de Sardaigne en 1832 sous le nom de Galleria reale, dans les salles du Palazzo Madama. Elle réunissait alors 365 œuvres appartenant à la Maison de Savoie et provenant du Palazzo reale et du Palazzo Carignano.
En 1860, Victor-Emmanuel II, roi d’Italie, fit donation de la collection royale à la nation italienne et, en 1865, la collection fut transférée au deuxième étage du Palazzo dell’Accademia delle Scienze.
En 1933, à l’occasion de son centième anniversaire, la collection acquit sa dénomination actuelle, Galleria Sabauda, qui rappelle son origine liée à la Maison de Savoie. Et ce n’est qu’en 2014 qu’elle fut déplacée vers son nouveau siège dans une aile du Palazzo reale.
Saint-François recevant les stigmates - Jan van Eyck
Cette huile sur bois date de 1430 environ. Elle fut achetée en 1886 pour la pinacothèque de Turin.
La Visitation - Rogier Van der Weyden
Ce panneau appartenait à un triptyque inventorié dès 1635 dans les collections de la Maison de Savoie. Il représente Marie et Élisabeth. En 1799, le panneau central qui représentait l’Annonciation fut démonté et emporté au Louvre par les troupes napoléoniennes. Il s’y trouve toujours.
La Vierge à l’Enfant, saint Jean, sainte Catherine d’Alexandrie et d’autres saints - Andrea Mantegna
L’image de l’Enfant qui repose son pied sur l’avant-bras de sa mère est une invention de l’artiste vénitien expérimentée à partir des années 1480. Il est question de cette toile dans une lettre de Frédéric Gonzague à Bonne de Savoie, épouse de Galeazzo Maria Sforza, datée de 1480. La peinture arriva à Turin dans les premières années du XVIe siècle.
Le repas chez Simon - Véronèse
Cette toile est référencée dans un inventaire du Palazzo Durazzo de Gênes à partir de 1739 et fut acquise par Carlo Felice en 1824 quand il acheta ce palais. Elle fut transportée à Turin par Carlo Alberto en 1842 en dépit de l’opposition des Génois.
Une version de ce sujet, très différente par les proportions et le cadrage, se trouve à la pinacothèque de Brera à Milan.
Rebecca et Eliezer au puits - Giovanni Lanfranco
Issu des collections dynastiques, ce tableau date de la période romaine du peintre (années 1620), époque où il était en relation avec le cardinal Maurice de Savoie, fils de Charles-Emmanuel Ier, duc de Savoie et prince de Piémont.
Il représente un épisode biblique : Abraham envoie son serviteur Éliezer trouver une compagne pour Isaac dans la lointaine Mésopotamie, parmi les membres de sa propre parenté. À son arrivée dans la ville, Éliezer dirige ses chameaux vers un puits.
Arrivé près du puits qui se trouve en dehors de cette ville, il fit agenouiller les chameaux. C’était le soir, à l’heure où les femmes venaient puiser de l’eau. Il pria ainsi : "Seigneur, Dieu de mon maître Abraham, accorde-moi de faire une heureuse rencontre aujourd’hui. Manifeste ainsi ta bonté pour mon maître Abraham. Me voici près du puits, et les filles des habitants de la ville vont venir y puiser de l’eau. Je demanderai à l’une d’elles de pencher sa cruche pour que je puisse boire. Si elle me répond : « Bois, et je vais faire boire aussi tes chameaux », je saurai que c’est elle que tu destines à ton serviteur Isaac. De cette manière, je reconnaîtrai que tu as agi avec bonté pour mon maître".
(Genèse, 24 : 11,21)
La présence de plusieurs toiles dans la tradition du Caravage est attestée dans un inventaire de 1630 et souligne l’intérêt de la Maison de Savoie pour l’achat d’œuvres contemporaines.
Cette peinture date de 1623. Réalisée à Gênes, elle fut immédiatement envoyée au duc de Savoie Charles-Emmanuel Ier. On perçoit l’influence du Caravage dans la composition : le rideau rouge et le lit défait font penser à La mort de la Vierge du Caravage qui est au Louvre. Le décor rappelle les peintures florentines du XVe siècle.
Cette huile sur panneau de bois représente un épisode de l’histoire romaine.
Lucrèce a été capturée par Sextus Tarquinius, fils du roi de Rome. Incapable de supporter le déshonneur qui a fondu sur sa famille, elle met fin à ses jours devant son père, son frère et sa servante. C’est l’incident qui déclencha la rébellion de Rome contre les rois étrusques et conduisit à la naissance de la République romaine.
Il est question de cette œuvre dans une lettre adressée en 1518 par l’artiste au marquis de Mantoue François Gonzague. Il y indique qu’il aurait souhaité lui offrir le tableau.
Mais celui-ci avait en définitive abouti chez Julien de Médicis, duc de Nemours, qui hébergea l’artiste à Florence entre décembre 1515 et février 1516.
Le tableau se retrouva finalement dans les collections de Savoie lorsque la veuve de Julien de Mécicis, Philiberte de Savoie retourna dans sa famille en 1518.
La toile qui précède est la partie supérieure d’un tableau d’autel. Elle est rescapée d’un incendie qui ravagea l’église San Girolamo de Venise en 1705. Elle représente, en contre-plongée au-dessus de la Croix, Dieu le Père qui accueille son fils.
Il est vraisemblable que le tableau fut acquis par Gerolamo Ignazio Durazzo (1676-1747) qui appréciait particulièrement la peinture vénitienne du XVIe siècle. La toile arriva dans la collection royale de Sardaigne lorsque Carlo Felice acquit la résidence génoise des Durazzo en 1824.
La cour de Savoie appréciait énormément la peinture vénitienne depuis que Le Titien avait fait le portrait d’Emmanuel-Philibert lorsqu’il était à la cour de Charles-Quint. Devenu duc de Savoie en 1580, son fils Charles-Emmanuel Ier passa des commandes pour son palais à des peintres vénitiens. Les toiles ci-dessous font partie de cette série.
Dans la première toile (ci-dessus) l’artiste renonce complètement au cadre exotique de l’histoire de Moïse sauvé par la fille du pharaon. L’œuvre peut être interprétée comme une allusion au jeune duc héritier dont les vertus lui permettront de conduire le peuple.
Jacopo dal Ponte, dit Jacopo Bassano, est, avec ses fils, l’un des principaux protagonistes de la peinture vénitienne de la seconde moitié du XVIe siècle. Leur répertoire, fondé sur des scènes rurales ou domestiques, connut un grand succès. Ce succès était également dû à une expertise sur les sujets religieux, en accord avec les prescriptions de la Réforme catholique.
La peinture de genre de l’atelier de Bassano atteignit les cours de Vienne, Prague, Madrid et évidemment Turin. Les tableaux présentés ici furent commandés par le duc Carlo-Emanuele I pour son palais ducal.